Depuis quelques temps, cette monnaie suscite des interrogations. Les problèmes d’ordre
économique des pays de l’Afrique francophone laissent place à une nouvelle réflexion sur l’avenir
de la Zone franc ou plus clairement, sur la pérennité des principes qui régissent la Zone franc.
Les objectifs de la constitution de la Zone franc.
En effet, l’instauration du franc CFA en Afrique a pour but d’assujettir davantage l’homme noir.
Pour aller plus loin, l’invité Jaurès SOGBOSSI affirme : « La monnaie coloniale FCFA a pour
objectif d’asseoir la domination française en Afrique francophone, contrôler la masse monétaire
en circulation dans les pays membres de la colonie française, empêcher le développement des
pays en empêchant l’accès aux crédits bancaires pour le développement des activités
économiques en général. ». Plus loin, principalement, elle vise à : « empêcher le développement
des activités industrielles génératrices de revenus et d’emplois décents bien payés pour tous.
Cette monnaie est imposée à ces pays pour permettre aux entreprises françaises et aux
investisseurs français de se faire la plus grosse part des marchés et de pouvoir transférer en
France leurs avoirs. »
Le franc CFA : un outil de développement économique ou un outil d’inertie
des économies de la Zone franc ?
L’utilisation de la monnaie coloniale FCFA affecte en grande partie les échanges internationaux
au vue de la politique de parité. En effet, l’Euro étant une monnaie de tête au niveau mondial, le
franc CFA ne pourra jamais compétitionner avec elle. Ceci étant, presque tous les pays de la
Zone franc ont une économie déficitaire sauf la Côte d’Ivoire qui, pour compte du cacao, ne
présente pas une économie assez drastique. De même, lors des échanges commerciaux, les
importations sont fixées en Euro (qui est fixé à 651,08 FCFA en 2023) et les exportations en franc
CFA. Le commerce intracommunautaire est très faible dans cette zone. Cela est dû à la non
complémentarité des différentes économies de la Zone franc au regard du maintien de l’insertion
primaire au sein du commerce international. L’exportation de la fibre du coton l’illustre mieux. La
fibre issue de l’égrenage est exportée à l’état brut à 97% il y a quelques années.
Étant donné que ¾ des États de l’UEMOA exporte cette fibre, il n’y a plus de raisons valables d’effectuer les
exportations intracommunautaires malgré le besoin crucial de devises pour le financement des
importations de produits finis. Aussi, le franc CFA est fortement arrimé à l’euro depuis 1999 avec
une garantie institutionnelle peu considérable de la part du Trésor français.
De même, si l’on s’en tient à la gestion du franc CFA depuis près de huit décennies dans les pays
de l’Afrique francophone, le seul avantage que ces pays tirent de l’utilisation de cette monnaie
est la libre convertibilité et la libre circulation des capitaux. Les investisseurs ne craignent plus la
dévaluation répétitive de la monnaie. Autrement dit, il n’y a aucun véritable avantage pour les
pays de la zone franc dans l’utilisation du FCFA selon Jaurès SOGBOSSI. Il affirme : « Seule la
France, les entreprises françaises installées en Afrique ou même les industries françaises situées
en France qui peuvent écouler leurs productions, trouvent des avantages dans cette monnaie
coloniale.». Comme l’affirmait l’ancien président délégué du gouvernement français il y a une
vingtaine d’années : « la stabilité monétaire organisée dans le cadre de la Zone franc n’a pas
véritablement eu des conséquences significatives sur la croissance du commerce africain…les
effets réels de la stabilité monétaire ont été limités. » Plus loin, il révèle un secret de polichinelle
en ces termes : « Avec la zone franc, on a fait l’inverse de ce que l’on veut faire en Europe. En
Europe, on a commencé par l’économie réelle, la monnaie unique en étant le couronnement. En
Afrique, on a commencé par la coopération monétaire et on attend en bout de course l’intégration
économique, qui viendra ou qui ne viendra pas. »
Ainsi, le franc CFA rencontre plusieurs problèmes dans les pays de la Zone franc. Il s’agit entre
autres de l’insuffisance de la réserve monétaire. Pour favoriser la croissance économique d’un
pays, il faut prioriser le crédit ; malheureusement le taux de l’émission monétaire fixé par le trésor
français n’encourage pas. Puisqu’ils utilisent cette monnaie dont la politique monétaire est
imposée par la France, les pays de la zone CFA sont, selon l’analyse du panafricaniste : « dans
un sous-développement énorme du fait de l’inexistence des industries manufacturières pour
créer des emplois, élargir les assiettes fiscales des pays et ainsi augmenter les capacités de
mobilisation de ressources financières des Etats afin de répondre aux besoins des populations.
Cette monnaie freine les exportations et favorise les importations de produits finis et donc ralentit
l’industrialisation du continent. Le chômage, le sous-emploi chronique, les départs massifs en
émigration autant clandestines que légales, le manque d’infrastructures routières, de santé,
d’éducation, et de bien-être des populations sont autant de problèmes dont font face les pays
utilisant la monnaie FCFA. »
Le franc CFA a-t-il un avenir ?
Au regard de tous ces maux dont souffrent les pays de la Zone franc, on peut affirmer avec
certitude qu’il n’y a aucun avenir pour le FCFA. « Cette monnaie ne fera plus long feu avant d’être
remplacée par une autre monnaie communautaire dans laquelle la France n’aura plus de place
de décision. » déclare Jaurès SOGBOSSI à la question de l’avenir de la monnaie coloniale.
L’approche normative de tout État pour sa monnaie relève la facilitation et l’émergence de cette
monnaie. Dans le cas contraire, l’on assiste à un cauchemar, ce qui est le cas de ces quatorze
pays. Le franc CFA n’a donc pas un avenir meilleur pour les pays partisans.
L’ECO, une belle démarche mais pas la meilleure solution.
Dans l’optique de résoudre ces divers problèmes, il a été conçu le projet de la monnaie ECO
initié par la CEDEAO. « Ce projet tel qu’il est initialement conçu par la CEDEAO est un projet
viable qui pourrait être une solution de rechange au FCFA. » reconnaît l’activiste béninois. Ses
partisans déclaraient que la future monnaie unique facilitera le commerce, réduira les coûts de
transaction et facilitera les paiements entre les 385 millions d’habitants de la CEDEAO et la revue
du taux d’inflation fixé à 2%. Mais, Jaurès SOGBOSSI trouve que : « depuis la récupération du
projet par le président Français Emmanuel Macron et le président Ivoirien Ouattara qui l’ont
complètement dénaturé, ce projet n’est plus un projet à considérer. ».
Un mode de gestion monétaire plausible pour la croissance économique en Afrique francophone.
Alors, pour offrir une nouvelle vision économique à ces pays déstabilisés par le franc CFA, Jaurès
SOGBOSSI, activiste panafricaniste béninois confie à icatvnews lors de l’interview que : « tous
les quinze pays de la zone franc doivent rester ensemble et lancer une monnaie commune dans
laquelle la France n’aura aucun rôle à jouer. Cette monnaie doit prioriser la croissance, le
développement, l’industrialisation dans sa politique monétaire, contrairement au FCFA qui
priorise la maîtrise de l’inflation par la limitation des crédits bancaires ». Aussi, une revue des
échanges dans l’espace CEDEAO doit être faite afin d’effectuer plus d’échanges entre pays
membres qu’avec l’extérieur. « Notons que le système de monnaies nationales où chaque pays
aura sa monnaie gérée exclusivement par ses dirigeants sera un système pire que le FCFA pour
certains pays » finit par conclure Jaurès S. lors de l’interview.
Comme le soulignaient Guillaumont Jeanneney S. et Guillaumont P. dans leur ouvrage Quel
avenir pour les Francs CFA, une autre solution pour plus de flexibilité aux francs CFA est : « le
rattachement des francs CFA, non plus à l’Euro mais à un panier de monnaies ad hoc, comportant
au minimum l’euro et le dollar, ou au DTS… L’idée sous-jacente est que, en cas de variation du
cours de change de l’Euro contre le dollar (ou d’autres monnaies du panier), la dépréciation ou
l’appréciation des francs CFA à l’égard de ces monnaies serait automatiquement atténuée.».
Plus loin, ces auteurs suggèrent le retrait de la main mise de la France dans les comités
monétaires. La présence de cette dernière laisse à croire à une « résurgence coloniale ».
Dans le cas échéant, les deux banques centrales de la Zone franc (BCEAO et BEAC) peuvent
penser à consolider la flexibilité en matière de change, à maîtriser les canaux de transmission de
la politique monétaire et à renforcer le Policy mix c’est-à-dire la politique monétaire et les
politiques budgétaires nationales. Néanmoins, il faut noter que les dirigeants africains doivent
prendre en main leur responsabilité et rendre plus claires les politiques de gestion monétaire.
Il urge de notifier que l’avenir d’un pays ne repose pas uniquement sur son économie. Les plans
politique et social sont également nécessairement à prendre compte.
Faut il le rappeler, le franc CFA encore appelé ‘’franc des Colonies Française d’Afrique’’, est né le 26 décembre
1945. Jour où la France ratifie les accords de Bretton Woods et procède à sa première déclaration
de parité au Fonds Monétaire Internationale (FMI). C’est une monnaie commune de quatorze
pays africains membres de la Zone franc instaurée lors des accords de Bretton Woods entre les
anciennes colonies françaises. Il s’agit : du Bénin, du Burkina, de la Côte d’Ivoire, de la Guinée Bissau, du Mali, du Niger, du Sénégal et du Togo qui forment l’UEMOA (Union Économique et
Monétaire Ouest Africaine) coordonné par la BCEAO et le Cameroun, la Centrafrique, le Congo,
le Gabon, la Guinée Équatoriale, le Tchad formant la CEMAC (Communauté Économique et
Monétaire de l’Afrique Centrale) coordonnée par la BEAC (Banque des États de l’Afrique
Centrale) et enfin les Comores.
Il prendra par la suite la dénomination de »franc de la Communauté Financière Africaine’’ pour
les États membres de l’UEMOA et ‘’franc de la Coopération Financière en Afrique Centrale’’ pour
les pays membres de la CEMAC.
Entretien réalisé par Salomé Houénafa KOHOUGBLA Cotonou icatv.news
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