Ahantoun, marque de luxe béninoise, allie patrimoine culturel et design moderne pour conquérir les marchés internationaux. Avec des collections masculines distinctives et un engagement envers la durabilité, la marque symbolise le renouveau de la mode africaine. Rencontre avec sa fondatrice,

LD: Comment est née l’idée de créer Ahantoun ? Quel a été le facteur déclencheur ?
L’idée d’Ahantoun est née d’un désir profond de valoriser notre patrimoine culturel à travers la mode. En visitant des ateliers d’artisans au Bénin, j’ai été frappée par la richesse de leurs savoir-faire et par le manque de reconnaissance qu’ils reçoivent. Je voulais créer un pont entre tradition et modernité, entre artisanat et design contemporain, pour faire rayonner nos identités à l’échelle internationale.
LD: Pourquoi choisir de positionner Ahantoun dans le domaine du luxe, un secteur encore peu exploré au Bénin ?
Parce que le luxe, pour moi, est le langage le plus noble pour parler de culture, de qualité et de transmission. Je voulais élever l’artisanat béninois au rang qu’il mérite, en le plaçant dans un univers où chaque détail compte, où l’histoire derrière chaque pièce est valorisée. C’est aussi une manière de casser les codes et de montrer que l’Afrique peut créer, innover et inspirer à un très haut niveau.
LD: Ahantoun puise ses racines dans l’artisanat béninois. Comment intégrez-vous cette tradition dans des créations modernes ?
Nous travaillons exclusivement avec des matières locales comme le bogolan, l’indigo ou le tissu tissé. Ces matières sont retravaillées dans des coupes contemporaines, sobres et structurées. L’idée est de conserver l’âme des tissus tout en les projetant dans un univers minimaliste, épuré, qui parle à une clientèle internationale exigeante.
LD: Votre cible principale est masculine, mais vous proposez également des pièces pour femmes. Comment gérez-vous l’équilibre entre ces deux segments ?
Nous avons commencé par la mode masculine car c’était un terrain moins saturé et en demande de renouveau. Mais naturellement, des femmes se sont intéressées à nos pièces, les portant parfois de manière oversize ou détournée. Nous avons donc lancé quelques pièces féminines, en édition limitée, en gardant la même exigence de qualité et de narration. L’équilibre se fait de manière organique, selon les retours et les envies de notre communauté.
LD: Quels sont les profils typiques de vos clients au Bénin par rapport à l’international ?
Au Bénin, nos clients sont des professionnels, des créatifs, des entrepreneurs qui cherchent à affirmer une identité forte, ancrée mais moderne. À l’international, nous attirons une clientèle de la diaspora, mais aussi des passionnés de mode éthique et de cultures africaines. Ce sont des gens curieux, engagés, qui veulent donner du sens à leurs achats.
LD: La fast fashion et les friperies inondent le marché africain. Comment Ahantoun fait-il face à cette concurrence ?
Nous ne jouons pas sur le même terrain. La fast fashion vend du prix, nous vendons du sens. Nos clients viennent chez nous pour une expérience, pour une pièce qui raconte quelque chose. Cela dit, c’est un vrai défi éducatif : il faut expliquer, sensibiliser, créer du lien. C’est pourquoi nous faisons beaucoup de pédagogie sur nos réseaux et lors de nos ventes privées immersives.
LD: Quels obstacles spécifiques rencontrez-vous dans la production locale (accès aux tissus, personnel qualifié) ?
L’accès aux matières premières est parfois limité ou irrégulier, surtout pour les teintures naturelles. Il y a aussi un manque de formation technique chez certains artisans. Nous avons donc mis en place des partenariats durables, avec un suivi rigoureux, et nous investissons dans la montée en compétence de nos collaborateurs pour garantir une qualité constante.
LD: Vous utilisez des tissus écologiques et des emballages durables. Pouvez-vous donner des exemples concrets ?
Nos tissus sont teintés à l’indigo naturel, sans produits chimiques. Nous recyclons l’eau utilisée dans le processus. Nos sacs d’emballage sont en coton bio, nos étiquettes en papier recyclé, et nos packagings sont conçus pour être réutilisables. L’esthétique est au service de la durabilité.
LD: Comment intégrez-vous l’upcycling dans vos collections ?
Nous récupérons les chutes de tissus pour créer des accessoires comme des pochettes, des ceintures ou des détails brodés. Certaines capsules sont entièrement conçues à partir de pièces vintage retravaillées. L’upcycling est pour nous un acte de création, pas seulement un geste écolo.
LD: Votre showroom à Cotonou est déjà en activité. Quelles sont vos attentes pour cette vitrine locale ?
Notre showroom, situé à Godomey, est plus qu’un espace de vente : c’est un lieu d’expérience. Nous y accueillons nos clients dans un cadre intime, pour leur faire vivre l’univers de la marque. C’est également un lieu de rencontre et de découverte, où nous partageons notre démarche et nos inspirations.
LD: Vous évoquez des franchises en Afrique francophone. Quels pays sont prioritaires et pourquoi ?
Nous regardons de près la Côte d’Ivoire, le Sénégal et le Rwanda. Ce sont des marchés dynamiques, avec une jeunesse créative et une demande croissante pour une mode locale premium. Nous voulons nous implanter là où notre message peut résonner et s’ancrer dans des réalités locales fortes.
LD: Vous collaborez avec des designers locaux et internationaux. Comment sélectionnez-vous vos partenaires ?
Nous cherchons avant tout des partenaires alignés avec nos valeurs : respect des savoir-faire, créativité, exigence. Qu’ils soient d’ici ou d’ailleurs, ce sont des collaborateurs qui comprennent notre vision et l’enrichissent. Nous fonctionnons beaucoup à l’intuition et à la qualité des échanges humains.
LD: Quel rôle jouent les réseaux sociaux (Instagram, Afrikrea) dans votre expansion ?
Un rôle crucial. Instagram nous permet de raconter notre histoire, de montrer les coulisses, de créer une communauté fidèle. Afrikrea est un canal de vente précieux pour toucher une clientèle africaine et diasporique engagée. Ces plateformes sont des leviers puissants de visibilité et de lien direct avec notre audience.
LD: Ahantoun soutient les artisans locaux. Comment évaluez-vous l’impact de ces collaborations sur les communautés ?
Chaque pièce vendue permet de rémunérer équitablement un artisan, de valoriser un savoir-faire, de créer une chaîne vertueuse. Nous avons vu des ateliers se structurer, des jeunes se former, des familles retrouver une stabilité grâce à ce travail. C’est notre plus grande fierté.
LD: Dans 5 ans, où voyez-vous Ahantoun : une maison de luxe panafricaine ou une référence mondiale ?
Les deux. Nous voulons rester enracinés en Afrique tout en rayonnant à l’international. Ahantoun sera, je l’espère, une maison de luxe panafricaine influente, reconnue pour sa rigueur, son audace et son engagement.
LD: Quelle pièce de votre collection représente le mieux l’avenir de la mode africaine ?
Notre veste indigo structurée, avec broderies traditionnelles et coupe architecturale, incarne parfaitement notre vision : entre héritage et innovation. Elle raconte l’Afrique d’aujourd’hui et de demain.
LD: Un conseil pour les jeunes entrepreneurs qui aspirent à suivre vos traces dans la mode africaine ?
Croyez en votre identité. Ne cherchez pas à copier, mais à révéler ce que vous êtes, profondément. Soyez patients, exigeants, curieux. Et surtout, créez avec du sens.
Propos recueillis par LIEGE DORIA TCHIAKPE de la rédaction de ICATV.NEWS
📍 www.icatv.news – Contact : media@icatv.news
Veuillez vous abonner à notre chaîne Telegram pour obtenir les dernières mises à jour sur les actualités.
L’actualité en continu http://Icatv.news











